APRÈS
LA SECONDE GUERRE MONDIALE
L'après-guerre
est la période qui suit immédiatement la Seconde Guerre mondiale et qui dure
jusqu'aux débuts de la guerre froide et la mort de Joseph Staline. Durant cette
période, l'organisation et l'économie de la nation sont développées et la
plupart des dégâts causés par la guerre sont réparés. Elle est fréquemment
marquée par le manque de nourriture, de produits de tous types et des
conditions de vie mauvaises.
Les guerres du XXe siècle ont provoqué des destructions à
une échelle inconnue des autres périodes. Il serait vain de vouloir séparer en
ce sens la Première Guerre mondiale, marquée par les épiques champs de bataille
que sont Verdun, la Somme ou le Chemin des Dames, et la Seconde Guerre
mondiale, caractérisée par les dommages faits aux civils et par la
systématisation d’un génocide. Trois facteurs peuvent expliquer la montée en
puissance destructive qu’orchestrent ces deux guerres, imitées par d’autres en
ce « féroce XXe siècle » : la « levée en masse » assure la participation du
plus grand nombre à la politique, d’où découle l’importance de la propagande en
tant que multiplicateur de volonté et de haine ; la peur rétrospective des «
guerres populaires » qui ont agité le XIXe siècle, et qui accentue la «
barbarisassions » des affrontements, et ce dès 1914; le processus de
diabolisation de l’ennemi, assimilé au traître qui pervertit l’ « harmonie »
nationale, dont les effets se font ressentir là aussi dès la Première Guerre
mondiale (recensement de 1916 des juifs servant dans l’armée allemande qui
participe de cette démonologie de l’ennemi intérieur ; expropriation
autoritaire de la valeur du travail qui commence avec le « communisme de guerre
» ; tentatives de déportation des Belges et des Polonais en octobre 1916). Au
cours des deux conflits mondiaux, tous les engagements pris ont été violés :
navires de commerce torpillés, gaz de combat employés, villes ouvertes
bombardées, otages fusillés, civils massacrés. Le pillage n’a jamais été porté
à un tel niveau d’aboutissement : classé par Aristote comme une industrie, au
même titre que l’agriculture, admis par les juristes médiévaux et des Temps
modernes comme « droit au butin » (jus praedarum), celui-ci se modernise
jusqu’à devenir officiel, d’État à État : émission d’une monnaie spéciale,
fixation de taux de change arbitraires, exportations obligatoires, mainmise sur
les rouages de distribution. Dans les faits, la « brutalisation » se traduit
par des destructions inédites, résultats d’une technologie guerrière sans
précédent (la « surprise technique » telle que la définit Raymond Aron) et
d’une orchestration et d’une instrumentalisation de la violence qui atteint son
comble.
C’est bien la raison pour laquelle les « phases de
reconstruction » prennent alors une dimension si importante, au vu des ravages
causés : les populations civiles, désormais parties prenantes de ces guerres
totales, restent alors prisonnières des très nombreux décombres qui perdurent
bien au-delà de l’armistice ou de la reddition sans conditions, traces
apocalyptiques de la guerre qui perturbent leur quotidien (pénuries de tous
ordres, ravitaillements plus ou moins prolongés, immeubles détruits ou
branlants, toits effondrés, etc.). Ce sont ces victimes, mal logés ou sans
abris, qui se tournent alors vers l’État pour qu’il améliore les conditions de
vie, par l’intermédiaire des terrassiers, des entrepreneurs, des travaux
publics : après les guerres, tout n’est pas pour le mieux, mais oui, le
bâtiment va...
Penser la reconstruction, c’est aussi voir la façon dont
les sociétés jugent la guerre et ses effets, et les conséquences au point de
vue législatif. À ce propos, on peut constater, avec la définition progressive
du « sinistré », l’idée généralisée que les pouvoirs publics ont pour devoir de
considérer le risque de guerre au nom de la solidarité nationale, ce qui
entraîne une évolution du droit dont tous les régimes placés face au problème
de la reconstruction doivent tenir compte : l’indemnisation des dommages de
guerre a tout autant été envisagée par la IIIe République (loi du 17 avril
1919), par le régime de Vichy (loi du 11 octobre 1940) que par la IVe
République naissante (28 octobre 1946), faisant du sinistré une figure
incontournable des après-guerres et un objet nouveau de la compétition
politique.
Aujourd’hui, les historiens ne considèrent plus les
conflits en eux-mêmes, mais comprennent l’intérêt des périodes qui les suivent,
où tout est à rebâtir. Cela revient à s’interroger sur le terme de «
reconstruction » : est-il synonyme d’après-guerre ? Désigne-t-il un phénomène
économique et social ? Doit-on s’en tenir aux problèmes architecturaux posés
par les destructions ? Peut-on observer à l’échelle urbaine un continuum entre
les reconstructions de la Première puis de la Seconde Guerre mondiale? Nous
tenterons de voir, à travers l’exemple français, hélas riche en exemples dans
la première moitié du siècle (1918, 1945 et, dans une certaine mesure au point
de vue des réalisations administratives et juridiques, 1940), si reconstruction
rime bien avec renouveau.
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